Il y a la fonction, il y a l'homme, la lumière du pouvoir suprême, la douche des mauvais jours; un clair-obscur que François Hollande incarne jusqu'à l'épuisement. Il y a la fatigue de celles et ceux qui ont vraiment cru à son discours du Bourget, où il fustigeait, par complaisance électoraliste, les hommes de l'ombre de la finance, les ennemis, où il promettait de réanimer le cadavre de la gauche fantasmatique et hors sol. Ça leur a plu ... ils n'en sont jamais revenus. Il y a la droite, dont la mauvaise foi est sans limite, qui n'a jamais appliqué ce qu'elle réclame à coups de hurlements, d'injures et de dérives populistes et martiales, qui promet à son tour, en Narcisse accompli, ce que veut entendre son pré-carré, son électorat chéri, qui a soif de revanche. La droite, qui refuse de voter avec la gauche, et inversement, même lorsque le projet ou la proposition de loi est conforme avec ses propres engagements. Il y a la gauche, toujours en retard d'une révolution, rarement en accord avec le réel, trop absorbée par ses dogmes doctrinaires, ses effets de tribune, qui n'hésite jamais à sacrifier la vérité sur l'autel des promesses non tenues, car irréalistes, et ses haines de clans, qui en disent long sur sa fidélité à la fraternité. Il y a ce dérèglement du débat démocratique, où le verdict des chiffres et des faits ne compte pas, où l'argumentation est un vestige du passé, remplacé par le discours incantatoire et accusateur, où le mensonge prend trop souvent la place de la parole politique, oui, la parole, vous savez, celle, sacrée, que l'on donne aux citoyens comme à un ami que l'on ne veut ni tromper ni trahir. Il y a donc François Hollande, un homme taillé pour la politique politicienne, mais pas pour la présidence d'un pays comme la France. Quand on connait le parcours et la personnalité de François Hollande, où tout concourt au goût du combat politique, il ne fait aucun doute que sa décision de renoncer à se représenter est courageuse. Pourquoi ? Parce que, précisément, elle est un faire-part de mort annoncée, comme l'apparition soudaine et inattendue à l'écran d'un suicide programmé. François Hollande part évidemment sur un échec. Son départ est un échec. Certains lui ont toujours préféré Nicolas Sarkozy. Celui-ci a été un pitoyable président de démagogie et de vulgarité, l'homme des casseroles. François Hollande est un honnête homme, cela ne fait aucun doute. Mais il est bien naïf. Son bilan est contrasté, d'excellentes mesures, comme le mariage pour tous; le Pacte de responsabilité et de solidarité; la loi Macron, avec la libéralisation de certains secteurs économiques; la création de la Banque publique d'investissement; la réforme territoriale; le choc de simplification administrative; l'engagement de 45.000 profs; la guerre contre le terrorisme islamiste; la Cop21. À côté de ça, le choc fiscal, pour ne pas dire la rage taxatoire des deux premières années du quinquennat a été catastrophique pour les classes moyennes; 500.000 chômeurs de plus en 2016 qu'en 2012; l'aggravation de la désindustrialisation de la France; l'affaire Cahuzac, terrible sur le plan symbolique; celle de Trierweiler, abominable de médiocrité, toutes deux lamentables; la sortie rocambolesque et casquée au scooter, ridicule; la déchéance de la nationalité, faute majeure; et, plus récemment, les trop nombreux livres de "confidence" et de commentaire en tous genres, publiés cette année, dont le dernier, "Un président ne devrait pas dire ça", intéressant sur le plan de la science politique, mais catastrophique, voire dramatique, pour l'image à la fois de l'institution présidentielle et de la personne du président lui-même. On le voit, ce bilan n'est ni blanc ni noir. Je crois que la personne de François Hollande lui-même ne l'a pas aidé à asseoir sa stature présidentielle. Il en a tiré les conclusions et compris la gravité, en renonçant, oui, courageusement, à se représenter. Pour conclure cette réflexion, je crois également qu'il a pris toute la mesure de l'impossibilité de rassembler les socialistes, profondément divisés entre la vieille gauche, incarnée par Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, Martine Aubry derrière, et les réformistes sociaux démocrates que symbolise Manuel Valls. Il y a là, comme l'a déclaré l'ancien premier ministre lui-même, deux gauches "irréconciliables". C'est pourquoi je pense que le PS français a de grande chance de ne pas survivre à la primaire de la gauche. Mon candidat, pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, reste et demeure Emmanuel Macron, seul à même, selon moi, de moderniser le pays, d'opérer une véritable révolution culturelle démocratique, sans aggravation de la fracture sociale et sans révolte dans la rue, seul capable de transcender les clivages obsolètes gauche/droite et la guerre de tranchées qui nuit tant à l'économie, à l'emploi et au rayonnement de ce merveilleux pays qu'est la France. Emmanuel Macron, c'est aussi l'homme qui, sans complexe, aspire à plus d'Europe, à mieux d'Europe. Pour moi, à l'heure des replis identitaires, des velléités de casses sociales et des envolées démagogiques, chacun reconnaîtra les siens, cela signifie quelque chose.
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